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22 août 2014 5 22 /08 /août /2014 14:56

voila la lettre que je vais envoyé à mon député

Monsieur,

Vous serez bientôt amené à vous prononcer sur la loi de transition énergétique, qui engagera l'avenir de notre pays pour plusieurs décennies au moins. Cela va sans dire : en France, une vraie loi de transition énergétique, qui réoriente notre société vers la sobriété et les énergies renouvelables, est indispensable et urgente. Nous avons besoin de mesures qui permettent de fermer rapidement nos réacteurs vieillissants afin d'arrêter de gaspiller des milliards dans une technologie dépassée et de laisser se développer les alternatives.

Chez nous, en dehors de toute consultation des citoyens et des parlementaires, la politique énergétique a depuis trop longtemps été laissée aux seules mains d'EDF et a toujours échappé au débat démocratique alors que l'Etat détient toujours 85% du capital de cette ex-entreprise publique. Je vous appelle à vous réapproprier cette question lors du prochain débat parlementaire, en vertu de vos prérogatives de député.

EDF fait feu de tout bois pour obtenir une décision politique qui l'autorise à faire fonctionner ses réacteurs nucléaires jusqu'à 50 voire 60 ans (au lieu des 30 initialement prévus), au mépris des risques accrus d'accident et des coûts astronomiques qu'impliquerait cette prolongation. Plus un réacteur vieillit et plus, avec le temps, certains éléments cruciaux, impossibles à remplacer, se fragilisent. Certains équipements peuvent être changés facilement, d’autres avec beaucoup plus de difficultés : tuyauteries enterrées, gaines de câbles électriques, couvercle des cuves de réacteurs, éléments du circuit primaire. Mais certains sont irréparables, car hors d’atteinte : cuves et enceintes des réacteurs. Le risque d'accident augmente dès lors avec l'usure des matériels sapés par l'irradiation, la pression et la chaleur extrêmes. Le nombre d'incidents sur les réacteurs nucléaires français est passé de 490 en 2000 à 817 en 2013 ; soit une augmentation d'événements de 67% en 13 ans. Ces problèmes, liés au vieillissement de nos centrales, ont en France un effet cumulatif dû à l'homogénéité de l'âge des réacteurs. Construit en un temps record entre la fin des années 1970 et 1980, le parc nucléaire français est aujourd’hui confronté à un effet d'obsolescence de masse : 80 % de ses tranches ont été mises en service entre 1977 et 1987. Elles atteindront donc ensemble leur 40e année entre 2017 et 2027, c’est-à-dire demain. Cela concerne près des deux tiers de nos besoins actuels en électricité. Ainsi, quatre réacteurs vont atteindre leurs 40 ans de fonctionnement d’ici 2018, 23 l’atteindront au cours des cinq années suivantes. En janvier 2012, la Cour des comptes sonnait l’alarme : « Compte tenu du délai en matière de politique énergétique entre la prise de décision et ses effets, ne pas prendre de décision revient à faire un choix, celui de faire durer le parc actuel au-delà des 40 ans. » L’alerte porte sur l’opacité des conditions de cette prise de décision. Car la voie de l’allongement de la vie des centrales s’ouvre « sans que ces orientations stratégiques n’aient fait l’objet d’une décision explicite, connue du grand public, alors qu’elles nécessitent des actions de court terme et des investissements importants », ajoute encore la Cour. La promesse de campagne de François Hollande de ramener à 50 % la part du nucléaire dans la production d’électricité (contre 75 % aujourd’hui) ne résout absolument pas le problème. Si 25 % des réacteurs ferment d’ici 2025, que deviennent tous les autres qui auront passé la quarantaine ou seront en passe de le faire ? Que l’on décide de les fermer également, de les prolonger ou de les remplacer par la nouvelle génération des EPR (dont une tranche est actuellement en construction à Flamanville, dans la Manche), leur vieillissement va devenir un enjeu de plus en plus important. A-t-on vraiment les moyens financiers, techniques et réglementaires de faire tourner ces équipements au-delà de 40 ans de vie ? Pierre-Franck Chevet, le président de l'Autorité de Sureté Nucléaire (ASN), estime qu'on peut avoir simultanément une anomalie grave (de la corrosion ou une fuite) sur cinq à dix réacteurs en France. L'ASN juge ce scénario "plausible, voire réaliste" et estime qu' "un tel événement nécessite d'avoir des capacités de production de substitution pour absorber le choc d'un arrêt de cinq à dix réacteurs" ! Ces réacteurs vieillissants présentent d'ailleurs un niveau de sureté que l'ASN refuserait pour tout nouveau réacteur. L'Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) explique de son côté que "dans le cas des centrales existantes, les accidents graves n'ont pas été considérés lors de leur conception. Les modifications envisageables de l'installation sont donc restreintes." Le coût financier de l’allongement de la durée de vie des centrales nucléaires pourrait donc s’avérer très élevé, beaucoup plus que les chiffres aujourd’hui mis sur la table par EDF. Le renforcement d’un réacteur de 40 ans pour le hisser à un niveau de sûreté renforcé, comparable à celui d’un EPR, pourrait coûter entre 2,5 milliards et 6,2 milliards d’euros par tête, estime Wise-Paris (bureau d’études réputé pour son expertise) dans un rapport commandité par l'ONG Greenpeace. Selon ses estimations, la facture des investissements à fournir serait quatre fois plus élevée que les moyens envisagés aujourd’hui par EDF. L’électricien annonce prévoir 55 milliards d’euros pour son « grand carénage », une remise à niveau général de son parc, montant auquel s’ajoutent les travaux occasionnés par les évaluations complémentaires de sûreté (ECS) exigées par l’ASN après la catastrophe de Fukushima. Dans un document interne de l'entreprise, EDF évalue à 100 milliards d'euros les investissements nécessaires pour censément améliorer la sureté des réacteurs et prolonger leur fonctionnement au-delà de 40 ans. C'est plus que le coût de construction du parc actuel (96Mds €). Et cette estimation sous-évalue la mise en œuvre des exigences de sureté renforcée définies par l'ASN après Fukushima. L'étude de Wise-Paris évalue ces travaux à environ 250 milliards d'euros. Wise-Paris a élaboré trois scénarios de sûreté (dégradée, préservée, renforcée) et tenté d’estimer les coûts financiers potentiels de chacun d’entre eux. L’enjeu majeur en gain de sûreté et en coût financier, c’est la « bunkerisation » des piscines de combustibles, c’est-à-dire leur couverture pour les protéger contre des événements extérieurs. Cette seule opération pourrait coûter 1 milliard d’euros par piscine, avait estimé l’ASN en 2011. Ce type de travaux pourrait entraîner l’arrêt de chaque réacteur concerné pendant deux ou trois ans. Au coût financier s’ajouterait alors le manque à gagner du non-fonctionnement de la tranche (en général évalué à un million d’euros par jour). Les principaux enjeux de sûreté sont donc aussi les principaux enjeux de coûts, explique Yves Marignac, directeur de Wise-Paris : la couverture des piscines de combustibles, la sécurisation du système de contrôle-commande, la protection des éléments constitutifs de « noyaux durs » (comme les moteurs diesels ultimes, destinés à pallier une perte d’alimentation en électricité). Conclusion de Wise-Paris : EDF ne semble pas prendre en compte la marche gigantesque à franchir que représente le tournant des 40 ans de ses réacteurs, sauf à tabler sur un niveau de protection symbolique et dérisoire.

Autre problème, déjà soulevé par l’ASN : le pic de charges. L’autorité a déjà prévenu qu’à moyens constants, elle ne parviendrait pas à traiter tous les dossiers de sûreté qui s’accumulent avec les années, et les nouvelles exigences post-Fukushima. Pierre-Franck Chevet, son président, a aussi publiquement déploré qu’EDF ne soit pas en état de gérer sa maintenance courante : "EDF a déjà des difficultés pour maîtriser ses arrêts de tranches et les opérations de maintenance des réacteurs. Ce défaut de maîtrise sera encore plus préoccupant dans 3 ou 4 ans, quand EDF envisage de faire ce qu'on appelle le "grand carénage", des opérations encore plus lourdes. EDF semble débordée par les travaux qu'elle a elle-même décidés." Au sein même d'EDF, l'IGSN (Inspection Générale pour la Sureté Nucléaire) admet que "la vérification de la qualité des opérations de maintenance n'est pas aujourd'hui correctement assurée". C'est donc la capacité industrielle d'EDF à mener à bien de tels travaux qui est mise en doute. D'autant plus que 50% de son personnel partira en retraite d'ici 2017, aggravant les pertes de savoir faire et l'affaiblissement de la transmission de l'expérience d'exploitation, déjà très préoccupante du fait de la sous-traitance généralisée confiée à des intervenants mal formés et mis sous pression. Que se passera-t-il si le volume des travaux croît de manière considérable ? Le fameux "grand carénage" , programme massif de modifications lourdes sur l'ensemble du parc nucléaire, exigera trois fois plus de personnel que la maintenance habituelle.

Autre exemple de surcharge : censées se produire tous les dix ans, les visites décennales de contrôle conduites par l’ASN glissent dans le temps. Si bien que sur les 27 réacteurs qui aujourd’hui ont franchi le cap de leurs trente années d’exploitation, seuls cinq ont reçu le feu vert réglementaire pour voguer a priori vers leurs 40 ans. L'hypothétique remplacement des réacteurs actuels par une quarantaine d'EPR coûterait environ 250 milliards d'euros selon EDF. Bien plus si l'on considère l'énorme dérive des coûts sur le chantier des EPR normand et finlandais. Par ailleurs, Henri Proglio, PDG d'EDF déclarait en mars 2012 que "le renouvellement du parc nucléaire à 40 ans supposerait de mettre en service l'équivalent de 30 EPR sur une période courte, en commençant dès 2020 : le rythme semble industriellement difficile à soutenir." Rafistoler les réacteurs semble donc trop cher et trop compliqué ; les remplacer semble infaisable et pas rentable car d'après une étude de Global Chance, association d'experts en énergie, l'injection dans l'économie de (seulement) 125 milliards d'euros permettrait de réaliser toutes les économies d'énergie nécessaires pour une sortie du nucléaire en 20 ans. D'importants gisements d'économies d'énergie sont bien connus et identifiés. Leur exploitation permettrait de diviser par deux la consommation finale d'énergie d'ici 2050, permettant d'éviter le rafistolage des vieilles centrales. Un autre mode énergétique est donc possible comme est envisageable, vraisemblable et concevable une France sans nucléaire qui, couplée à une transition énergétique, serait une formidable opportunité pour l'emploi. En Allemagne, près de 380 000 personnes travaillent dans le seul secteur des énergies renouvelables, sans compter les activités liées aux économies d'énergie. En mars 2013, l'association négaWatt faisait paraître un scénario de transition énergétique avec sortie du nucléaire aboutissant, d'ici 2030, à la création nette de plus de 630 000 emplois en France. Un élément non négligeable pour d'aucuns qui gardent les yeux fixés sur la ligne bleue inversée de la courbe du chômage. Des emplois liés par exemple à la rénovation thermique des bâtiments, chantier de grande ampleur, fortement pourvoyeur de travail qualifié non délocalisable. En comparaison, la filière nucléaire représente environ 120 000 emplois directs et indirects. Une proportion non négligeable de ces emplois devrait d'ailleurs obligatoirement être maintenue durant de longues années après l'arrêt des réacteurs. Car on ne sort jamais du nucléaire une fois la filière installée. La gestion des déchets et des anciens sites de production est une régie ad vitam aeternam.

Dilapider des centaines de milliards d'euros pour prolonger le fonctionnement des réacteurs ne ferait que reporter de 10 à 20 ans les investissements massifs qui sont, de toute façon, nécessaires pour construire le système énergétique des prochaines décennies. Dans l'intervalle, le risque que la France subisse un accident nucléaire majeur, et ses conséquences sociales, économiques et environnementales dévastatrices, ne cessera de s'accroître. Dans le monde, la fréquence constatée d'accidents nucléaires majeurs est 286 fois supérieure à celle qui aurait dû être observée si l'on se fiait à la probabilité théorique standard des études de sûreté. En se fondant sur la fréquence réelle constatée, le mathématicien Etienne Ghys calcule ainsi qu'il y a 72 (mal)chances sur 100 pour qu'un accident nucléaire majeur se produise d'ici 30 ans en Europe. Fukushima a démontré que l'improbable était possible ; les chiffres démontrent qu'en France, un accident nucléaire grave est une certitude statistique. Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de Sureté Nucléaire, déclarait en mai 2013 : "l'accident est possible en France, il faut donc se préparer à ce type de situation, y compris à des crises importantes et longues". Et selon l’IRSN, un accident nucléaire majeur en France "constituerait une catastrophe européenne ingérable", et son coût atteindrait de 430 à 760 milliards d’euros.

Je compte donc sur vous pour vous opposer fermement au projet de prolongation de vie des centrales nucléaires françaises au-delà des 40 ans et vous demande de défendre les positions suivantes lors du débat parlementaire, et de conditionner votre vote de la loi de transition énergétique à leur prise en compte effective :

1. arrêt immédiat des réacteurs les plus vieux et les plus dangereux, sachant qu'à la fin 2014, 33 réacteurs auront déjà dépassé 30 ans de fonctionnement. Avec un objectif chiffré de fermeture de réacteurs à l'échéance 2025 et une feuille de route pour organiser ces fermetures ;

2. arrêt définitif du programme EPR et renoncement à tout nouveau projet de réacteur ;

3. adoption d'un objectif impératif de réduction de 20% de la consommation finale d'électricité à l'horizon 2025, les économies d'électricité étant un déterminant fondamental d'une vraie transition énergétique.

nucléaire, non merci !!
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  • moniteur éducateur,  animateur d'abord de 1975 à 1977, puis directeur bénévole de centre de vacances d'enfants handicapes mentaux de 1980 à 2010. tout cela avec les éclaireurs de France
militant altermondialiste  et surtout écologiste 
je souhaite lutter pour une société égalitaire
pour la rupture avec le capitalisme ! retraité
  • moniteur éducateur, animateur d'abord de 1975 à 1977, puis directeur bénévole de centre de vacances d'enfants handicapes mentaux de 1980 à 2010. tout cela avec les éclaireurs de France militant altermondialiste et surtout écologiste je souhaite lutter pour une société égalitaire pour la rupture avec le capitalisme ! retraité

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